Depuis quelques années le monde éditorial se montre aussi créatif que les auteur•rice•s afin de créer de nouveaux genres – et sous-genres – littéraires : chicklit, bit-lit, new romance, feel-good books, et j’en passe…
Une œuvre, quelle qu’elle soit, entre rarement dans un seul genre. Elle déborde toujours un peu. On inclut de la romance dans un policier (Rebecca de Daphné du Maurier), du thriller dans une science-fiction (Rapport minoritaire de Philip K. Dick). Un voyage dans le temps peut virer au post-apocalyptique (La machine à explorer le temps de H.G. Wells).
Bref, difficile d’arriver à trouver les bonnes cases au moment de l’enregistrement de son bébé, fraîchement nouveau-né, dans la jungle des catégories proposées sur les plateformes d’autoédition. Surtout que, bien souvent, ces dernières imposent une limite à deux genres.
L’important est donc d’avoir assez de recul sur son texte – et de connaissances sur les genres littéraires – pour le valider sur les étagères adéquates du magasin.
Lorsqu’un lecteur choisit un thriller, par exemple, il attend de son contenu certains stéréotypes liés au genre. Pour le cas sus-cité, il y a de fortes chances qu’il recherche un frisson (thrill) proche de la peur ou de l’angoisse. Il anticipe, de fait, une atmosphère plutôt noire, voire sinistre, peuplée de personnages sombres, corrompus ou violents dans votre récit. Ambiance dont il découvre une entrée en matière à travers le paratexte (couverture, titre, quatrième de couverture…).
Pour résumer, en inscrivant votre ouvrage dans un genre, en le définissant comme tel, vous signez de façon implicite un contrat de lecture avec votre public.
Et comme tout contrat, l’important, par la suite, est d’en respecter les termes, si vous ne voulez pas connaître les affres d’un furieux retour de flammes.
Si vous le respectez, vous gagnez le lecteur. Peut-être que celui-ci se fidélisera même à votre plume.
Si vous le trahissez, vous le décevrez. Non seulement vous perdrez ce lecteur, mais, de plus, il risque fort de faire mauvaise presse de votre livre.
Attention : « respecter » ne signifie pas qu’il faut aligner les clichés du genre dans votre texte. L’auteur peut en dévier – et heureusement. Mais il ne pourra s’en détourner et créer une vraie surprise au lecteur – un climax – que dans la mesure où, au départ, il aura su jouer avec les codes.
J’entends « trahir » dans le sens où un lecteur ne retrouvera pas les éléments typiques du genre – ou alors de façon anecdotique – dans lequel a été inscrit le livre.
Dans le premier cas nous aurons une réaction du type : « C’était étonnant. Ça commençait comme un thriller et d’un coup ça a viré à la dystopie ! » alors que dans le second nous aurons : « j’ai acheté un thriller, je le cherche encore… »
La nuance est importante.
Sortir un lecteur de sa zone de confort implique qu’on l’y a préalablement installé.
Raison pour laquelle on apprécie certains genres plus que d’autres. Non pas pour y côtoyer les mêmes histoires, les mêmes mondes, les mêmes personnages, mais parce qu’on s’en approprie les schémas, les codes. Ils titillent notre imagination et notre plaisir personnel.
Évidemment, un mauvais livre, tout bien classé soit-il, restera un mauvais livre (même si le terme “mauvais livre” demeurera subjectif).
Néanmoins, un bon livre mal classé peut aussi se révéler une catastrophe. Le malheureux ne rencontrera jamais son public.
Ayez du recul sur vos écrits. Apprenez les codes spécifiques de chaque genre. Ciblez avec soin. Préférez les grands genres connus de tous, plutôt que de vous fourvoyer au milieu des nouveaux genres commerciaux, peu clairs et peu parlants (et qui, selon moi, ne sont d’ailleurs que des sous-genres de ceux déjà existants).
Dans les semaines à venir, les indéchaînés souhaiteraient développer une série d’articles, genre par genre (avec leur lot de sous-genres) afin de mieux les appréhender. Nous espérons que ceux-ci se révéleront un outil pertinent et sauront aider auteurs comme lecteurs dans leurs choix littéraires.
Il est temps d’assumer votre romance, votre thriller, votre soap.
Il existe un public pour tout type d’œuvre.
Pourquoi se contenter d'une seule vie ? Il en existe tant de possibles. Il y a tant à explorer. Pensez à tous ces aiguillages que vous n'emprunterez jamais, que vous ne choisirez jamais, à toutes les routes que vous pourriez créer, ici ou ailleurs... Voilà le bonheur que l'on se procure en écrivant.
Bonjour, Merci pour cet article, tant le choix des catégories est un casse-tête (en tout cas en ce qui me concerne). Je partage votre avis sur l'importance de ne pas "tromper" le lecteur quant à ce qu'il s'attend à trouver dans le livre en fonction de la catégorie dans laquelle il l'a trouvé. En revanche, je plus partagé quant à votre idée selon laquelle, il serait nécessaire de "jouer avec les codes" (même sans tomber dans l'accumulation de clichés). Ne pensez-vous pas qu'il faille écrire son roman sans contrainte de genre, et seulement ensuite, s'interroger sur le cadre dans lequel i va pouvoir s'inscrire ? Bonne journée.
Bonjour, contente que cette approche vous ait plu, vu qu'elle est destinée à ouvrir une série par la suite pour le site.
Pour répondre à votre question, les deux procédés se tiennent et se pratiquent. Parfois, certains auront une écriture instinctive sur leurs textes et s'interrogeront a posteriori. D'autres partiront avec un projet défini : envie d'écrire une histoire d'amour, de pirates, de cadrer leur récit dans un contexte historique précis, de se diriger vers de la Science Fiction...
Certains thèmes ne tombent pas toujours au hasard de la rédaction. Leur auteur les entrevoit à l'avance. Il m'apparaît important, dans ce cas de figure, de respecter les grandes lignes et schémas du genre dans lequel on sait que l'on va s'inscrire, sans pour autant tomber dans un catalogage de stéréotypes.